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Laurence BANCEL-CHARENSOL

Dépôts des données comptables analytiques des CFA : Quel rapport avec la politique européenne ?

Dernière mise à jour : 26 mai 2023

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by Laurence BANCEL-CHARENSOL




Le marché de la formation en apprentissage n’a été ni libéralisé ni dérégulé ! Il a été re-régulé !


Mais ?? Les modalités d'accès ou d'exercice de l’activité de formation en apprentissage ont été profondément revues avec la loi de 2018, nous direz-vous…

C’est vrai ! Mais elles sont toujours fortement encadrées par des dispositions législatives ou réglementaires. Et parmi ces outils de régulation on trouve, comme un orni* (objet règlementaire non imaginé), la comptabilité analytique !


Le dépôt des données de comptabilité analytique des OFA au titre des comptes 2022, c’est maintenant ! Alors ce mois-ci, on décrypte, rien que pour vous, la 3ème campagne de remontée des données comptables et analytiques des CFA à France compétences et on vous emmène… jusqu’en Europe !



Au programme de cet article :

  • Dans quel contexte règlementaire cela s'inscrit-il ?

  • Mais qu'est-ce qu'une comptabilité analytique pour un CFA ? Quelles sont les règles applicables ?

  • Et concrètement comment cela s'organise-t-il ?

  • Quel est le calendrier de la campagne 2023 au titre de l'exercice 2022 ?

  • Et pour de vrai, à quoi cela sert-il vraiment ?

  • Et pour finir, partons en Europe !



Dans quel contexte règlementaire cela s’inscrit-il ?


Cet exercice complexe et très consommateur de temps et d’énergie est effectivement une obligation.


La mise en place d'une comptabilité analytique est prévue à l'article 24 de la loi du 5 septembre 2018 par la modification de l’article L. 6231-4. du code du travail qui précise dorénavant que :

« Tout centre de formation d'apprentis a l'obligation de mettre en place une comptabilité analytique. Les règles de mise en œuvre de cette comptabilité analytique ainsi que le seuil à partir duquel cette obligation s'applique sont fixés par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle. »

A ce jour, c’est l'arrêté du 30 mars 2023, venu modifier l'arrêté du 21 juillet 2020 qui détaille les règles de mise en œuvre de la comptabilité analytique pour les CFA et les OFA.


« La tenue d'une comptabilité analytique concerne tous les organismes de formation professionnelle, publics ou privés qui réalisent à titre exclusif ou non une activité de formation par apprentissage et ce, quel que soit leur statut, leur régime d'imposition et leur chiffre d'affaires ou produits. » (Article 2 de l’arrêté)

En d’autres termes, tous les organismes de formation qui ont dispensé des formations en apprentissage en 2022 sont concernés.


 


Mais qu’est qu’une comptabilité analytique pour un CFA ? Quelles sont les règles applicables ?


Bon ! On ne va pas ici vous faire un cours !


Mais pour synthétiser on peut dire que la comptabilité analytique c’est un dispositif de traitement comptable particulier qui doit permettre de retracer les coûts et les produits qui interviennent dans la réalisation de chaque formation par apprentissage.


On ne vous le dira jamais assez : VOS données de comptabilité analytique sont la matière première des NPEC !


Le but : Assurer le financement de l’apprentissage par des fonds légaux mutualisés de façon soutenable et en améliorant le rapport qualité/prix des formation :


  • Obliger les CFA/OFA à mettre en place une comptabilité analytique normalisée par le régulateur pour identifier l'ensemble des charges et des produits à des fins de connaissance des coûts des CFA/OFA ;

  • Observer les principales évolutions des modèles économiques pour fixer des niveaux de prise en charge au plus près de la réalité des coûts de formations en apprentissages des CFA et OFA ;

  • Préparer les décisions à venir sur l’évolution des niveaux de prises en charge.


Les publics concernés : les organismes de formation professionnelle, tous statuts confondus, qui délivrent des actions de formation par apprentissage.


La période de référence : l’année civile, quelle que soit la date de clôture des comptes de la structure.



Mais attention il y a d’importants changements concernant les remontées en 2023 !



D’une part, le détail et la portée des informations apportées par la comptabilité analytique s’accroît considérablement !

  • Ces remontées vont apporter pour la première fois des données post-COVID ! En effet, les deux années de remontées précédentes concernent 2020 et 2021. Périodes durant lesquelles les CFA (comme nous autres d’ailleurs) ont dû faire face à des périodes de confinement.

  • Cette année, le coût de formation et les produits correspondant devront être identifiés par diplôme et titre préparé, et même... par établissement !


D’autre part, la classification analytique des charges et des produits de l’activité apprentissage change.

  • La notion de "typologie de formation" disparait au profit de celle de "diplômes et titres".

  • On note une standardisation plus forte des règles de répartition des charges indirectes et des clés de répartition utilisées.

  • La décomposition exigée des frais annexes à la formation est plus fine.

  • La décomposition des catégories de produits et le détail en fonction des canaux de financement sont également plus finement réalisés.

  • On ne doit plus faire de distinction entre investissement pédagogiques et autres investissements.

  • En revanche la distinction entre les autres charges incorporables et les charges non incorporables est explicitée.

  • En cas de recours à des UFA, leur nombre, intitulé et nombre d’apprentis doivent être communiqués.


Une autre modification importante concerne l’obligation de documentation détaillée :

  • Toutes les remontées doivent être accompagnées d’une note de synthèse explicative.

  • De surcroît, il est prévu que France compétences puisse solliciter le CFA/OFA afin d'obtenir des précisions sur la détermination des coûts.


Enfin, pour s’assurer d’une plus grande fiabilité des données produites, les CFA/OFA ont l’obligation de produire une attestation par un comptable public, le commissaire aux comptes de l'organisme ou, à défaut, son expert-comptable.


 

Et concrètement comment cela s’organise-t-il ?


C’est la direction « Régulation » qui a la charge au sein de France compétences de collecter et traiter l’ensemble des données transmis par les CFA/OFA selon les modalités établies.


La transmission se fait par l’intermédiaire de la plateforme extranet dénommée Karoussel ; les informations relatives à l’accès et à l’utilisation de cette plateforme sont disponibles sur le site de France compétences et sur la plateforme directement.


On trouve notamment des documents importants sur le site de France Compétences :



France compétences organise également des réunions de travail avec les réseaux de CFA, des webinaires pour accompagner les OFA dans leur démarche de transmission.

  • le 9 mai pour l’utilisation de la plateforme « Karoussel » ;

  • le 16 mai pour l’élaboration de la déclaration.



Et en cas de difficulté, les CFA peuvent contacter France compétences : comptes-apprentissage@francecompetences.fr.


 

Quel est le calendrier de la campagne 2023 au titre de l’exercice 2022 ?


Voici les différentes étapes :



04 mai 2023 : ouverture de la page d’inscription et de la plateforme Karoussel

  • Inscription des nouveaux organismes pour l’ouverture de compte utilisateur, ou

  • Mise à jour des données pour les organismes qui disposent déjà d’un compte utilisateur.



15 mai 2023 : mise en ligne de la déclaration sur la plateforme Karoussel.

  • Les organismes concernés pourront, à partir de cette date, renseigner et transmettre la déclaration de leurs données comptables et analytiques.




31 juillet 2023 : Date limite de transmission des déclarations.





Entre septembre et novembre 2023 : France compétences effectuera une première analyse des données.

  • Certains organismes pourront être contactés pour des précisions concernant leurs données.


Alors effectivement, les remontées de l’exercice 2022 n’alimenteront pas tout de suite la réflexion sur la baisse des NPEC, notamment celle annoncée (et en discussion avec les associations de CFA/OFA) pour le courant de l’année 2023. Sauf si, comme les années précédentes, France compétences utilise un échantillon pour compléter l’analyse menée à partir des exercices antérieurs.


 

Et pour de vrai, à quoi cela sert-il vraiment ?


Pour comprendre plus finement les logiques à l’œuvre sur cette remontée 2023, il faut d’abord s’intéresser de plus près au programme de travail des commissions « Audit et finances, « Evaluation » et « Recommandations » validés par le Conseil d’administration de France compétences du 15 décembre 2022.



[Ndlr : Vous vous en rappelez peut-être, on vous en avait parlé à l’occasion deux posts sur LinkedIn en janvier 2023 ? 🙋‍♀️]





Regardons, par exemple, le deuxième axe thématique de la commission évaluation.


Consacré à la recomposition de l’offre de formation (et d’accompagnement) et à l’appréhension du ratio coût/qualité, il est particulièrement éclairant à ce sujet !


L’objectif est de mettre en perspective l’analyse des coûts des comptabilités analytiques, et de leur structuration (coût d’accompagnement, coût pédagogique en particulier), avec la performance de l’apprentissage, elle-même appréhendée à travers plusieurs indicateurs (insertion, poursuite d’étude, rupture, valeur ajoutée des CFA).



Il s’agit en particulier de :

  • Réaliser une cartographie quantitative des prestataires de formation pour dresser un panorama des organismes de formation présents sur le marché ;

  • Rendre compte des effets de segmentation observables depuis la loi de 2018, en termes en particulier de types de publics et sources de financements ;

  • Lancer une étude qualitative sur l’organisation économique des CFA à la rentrée 2023 pour mieux comprendre les modèles qui émergent de la comptabilité analytique ;

  • D’exploiter des données de la comptabilité analytique des CFA sur deux années pour mieux appréhender les effets d’échelles et logiques d’investissement ;

  • D’apparier des comptabilités analytiques avec la base Inserjeunes, centrée sur les parcours d’insertion des apprentis et des lycéens sous statut scolaire à différents horizons temporels.


 


Et pour finir, partons en Europe !





Les coûts unitaires par formation alimentent à la fois le processus d'élaboration des NPEC et, on le voit dans les prises de positions des Directrices et Directeurs de CFA, les nouveaux instruments de gestion mis en œuvre et supposés améliorer l'efficience de ces organismes de formation.


Tout l’enjeu est de s’assurer que la méthode actuelle normalisée par le régulateur reflète la complexité réelle de la formation des apprentis et de la prise en charge de leur suivi en entreprise.


Or, pour pouvoir répondre aux contraintes et à la complexité du réel, un certain degré de découplage entre cette comptabilité et l'activité réelle est souhaitable.


Pourtant, la comptabilité analytique des CFA selon la méthode des coûts complets institutionnalisée par le régulateur France compétences, n’est pas seulement un instrument au service de l'efficience des CFA c’est aussi un facteur d’aide à la décision d’ouverture et de fermeture des formations des OFA au sein d'un environnement fortement institutionnalisé.


Certaines déclarations fracassantes qui circulent sur les réseaux en attestent :


« J'ai encore des Masters qui sont tombés à 4500 € en 2022 et dont les restes à charge entreprise sont donc de 3000 € en moyenne par an... Bien entendu, nous avons fermé ces formations en cette rentrée 2023. » Un Directeur de CFA

« En juillet dernier, la première baisse de 5% en moyenne s’est traduite par 15 à 20% en moins dans certains secteurs. Et 2023 n’est pas du tout la bonne année pour lancer une deuxième baisse des niveaux de prise en charge ! » Un responsable de fédération de Directeurs de CFA


Dès lors se pose la question de la pertinence des NPEC et des outils de gestion alimentés par ces coûts unitaires dans les CFA.


Car cette régulation du marché par les NPEC doit être considérée au regard des objectifs poursuivis nationalement par la France et qui sont fortement impactés par la politique européenne !


En effet, n’oublions pas que l’année 2023 est l’année européenne des compétences et qu’il y a d’importants et nombreux financements et aides à l’échelle européenne déjà en place à capter, comme par exemple, le Fonds social européen plus, la facilité pour la reprise et la résilience, le programme pour une Europe numérique, Horizon Europe et Erasmus +.


La régulation du marché de l’apprentissage par les NPEC, entre autres, permet à la France de s’inscrire dans des programmes d’aide financières qui visent « à remédier aux pénuries de compétences dans l’UE [pour] favoriser un état d’esprit de reconversion et de perfectionnement professionnels, en aidant les personnes à acquérir les compétences adéquates pour des emplois de qualité. ».


Ces programmes d’initiatives pour remédier aux pénuries de compétences dans l'UE et renforcer la coopération en matière de migration ciblent plusieurs objectifs :

  • Promouvoir les investissements dans la formation et le renforcement des compétences ;

  • Veiller à ce que les compétences soient adaptées aux besoins du marché du travail ;

  • Mettre en adéquation les aspirations et les compétences des citoyens et les possibilités offertes sur le marché du travail ;

  • Attirer des personnes de pays tiers possédant les compétences dont l’UE a besoin.


Ce sont des ressources financières stratégiques pour la France et pour le financement de la formation professionnelle. Et nous sommes alors très éloignés des décisions de gestion internes aux CFA !


 

Tout ceci nous emmène peut-être trop loin ! Quoique ?


Notre objectif chez MGA est bien de vous aider à conquérir le monde, alors l’Europe…


 

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